Par SANOU A. à Ségou au Mali
Le travail de mise en scène de Bibata Ibrahim Maïga, jeune artiste danseuse, performeuse malienne, a été présenté le vendredi 02 février 2024 à Ségou au Mali, dans le cadre de la 20e édition de Ségou’Art-Festival sur le Niger.
La chorégraphe qui se fraie un chemin, rend hommage aux Forces armées maliennes (Fama). Si la bravoure et le courage de ces guerriers contre les obscurantistes semeurs de désordre sont reconnus, elle a tenu à évoquer les conditions dans lesquelles ils travaillent, ils combattent. Pour cela, elle a coopté cinq danseurs (Ismaila Traoré, Dramane Sanogo, Assétou Doumbia, Fatoumata Diarra et Mami Camara qui chante aussi).
« Dernier souffle », c’est les derniers mots, la dernière respiration d’un soldat au front, qui a vécu des choses. Il a des choses à dire avant de rendre l’âme », confie Bibata. La chorégraphie a été montée à partir d’un texte qu’elle a écrit elle-même. « A l’écriture, j’ai imaginé ce soldat en train de dire toutes les choses qu’ils ne pouvaient pas dire. On est dans un monde où il n’y a pas beaucoup de liberté d’expression », soutient-elle pour justifier sa mission de retransmettre la dernière volonté de ce soldat.
« Le soldat est choisi, il part ». Aller ou ne pas aller, ont-ils le choix ? C’est tout le sens de sa création. Ce doute sans issue, le devoir irréversible, ce sacrifice pour sa communauté. « La crainte de la guerre étant encore pire que la guerre elle-même », laisse-t-elle entendre.
Dans ce choix aussi compliqué que complexe, le soldat revient il héros ou martyrs. Soit il arrive à vaincre l’ennemi, soit il est tué par celui-ci. Sa création est donc un hommage aux martyres et à toutes les personnes qui ont rendu l’âme au front.
« Dernier souffle » est un mélange de danse, de chant et de théâtre. La chorégraphie est introduite par un masque porté par un danseur, puis récupéré par une danseuse. « Le masque, selon mes recherches est un masque Vodou. Il représente aussi « Niéléni » de Sikasso. Ça l’allure d’un masque guerrier et il représente tous ces vaillants hommes tombés. Ils sont devenus une force pour nous. On croit qu’ils sont partis mais ils ne le sont pas », nuance la jeune chorégraphe. Elle est convaincue » que « le changement qu’on constate aujourd’hui, c’est aussi grâce à leur présence. Le combat qu’ils n’ont pas pu achever, ils continuent de le mener », pour le bien être des siens.
Derrière la guerre, il y a de nombreuses atrocités : le viol, la violence. Et les premières victimes étant les femmes et les enfants, le spectacle s’attarde sur leur souffrance, leur peine, leurs pleurs. Avant d’évoquer la place prépondérante qu’elles ont dans la stabilité, la paix.
« Dernier souffle » est une création en cours. Le travail proposé a été effectué sur un mois. Il reste encore à faire une résidence technique pour finir la phase musicale et clôturer la phase des costumes et les lumières. Mais déjà, ça tout l’air d’un coup de maître. Et le sérieux de Bibata y est pour beaucoup.