« La mise en garde d’aimé Césaire (1913-2008) contre les dirigeants grisés par le pouvoir et l’argent est toujours d’actualité », affirme Soro N’golo Aboudou, auteur de « L’expression de la révolte dans le théâtre d’Aimé Césaire. La dédicace du livre a eu lieu le 19 juin 2021 à la Librairie Carrefour Siloé, à Cocody. Auteur d’une thèse de plus de 400 pages sur l’œuvre littéraire de l’un des pères de la négritude, l’auteur invite, à travers une version compressée (216 pages), à mieux comprendre et partager la vision de Césaire.
Pour lui, « la notion d’étape vers une indépendance totale et comme démarche politique dans la construction nationale », est d’actualité en Afrique. L’objectif idéologique de Césaire, explique-t-il, « n’a jamais été d’opposer des hommes à d’autres hommes, des frères à d’autres frères, des peuples à d’autres peuples, mais d’aboutir à une véritable liberté des peuples négro-africains, individuellement et collectivement ».
Commis à la présentation du bouquin, Eloi Noël Kouassi, indique que « le texte est aéré et écrit dans un style vif et incisif. Mais, atténué par un humour bienséant…». De façon idéologique, il souligne deux problématiques : celle relative à l’aliénation dans le théâtre de Césaire et l’intériorisation du complexe chez le nègre. Et d’affirmer : « l’assimilation du nègre, son humiliation, tout le tragique du héros, trouve sa source dans cette profonde philosophie raciste, négrophobe élaborée sciemment par ceux qui se sont donnés pour objectif la domination-subordination du monde noir… Le nègre vit, subit les brimades mais trouve comme rempart le formalisme nègre ».
L’auteur, à travers cette œuvre, touche à des questions très profondes comme la dépigmentation de la peau, mais considérées banales tant les Noirs s’y accommodent de nos jours. « Le mépris de sa peau et la volonté de la blanchir, le rejet de son identité pour une identité d’emprunt, le sentiment d’infériorité, la fascination qu’exerce la peau blanche sur le Noir », sont autant de faits qui doivent mener à l’érection d’une conscience noire, une politisation des masses qui passe par la révolte.
Pour l’auteur, le Noir à qui l’on a ravi la liberté n’est pas resté sans agir. Et les héros de Césaire (Christophe, Lumumba…) sont là pour en témoigner.
Professeur Valy Sidibé, qui a assuré la présidence du travail scientifique, a remercié l’auteur qui a accepté « de mourir pour que l’autre naisse », en s’adonnant à l’exercice d’écriture. Rappelant une parole de son maître, il a averti que « la colonisation ne s’arrête jamais ». « L’aliénation n’est pas finie », insiste-t-il.
Sanou A.