Alougbine Dine, directeur de l’École Internationale de Théâtre du Bénin (Eitb), a mis en scène la pièce de théâtre La Rue Bleue, un chef-d’œuvre du dramaturge béninois Sèdjro Giovanni Houansou. La pièce a été représentée, le vendredi 11 et le samedi 12 décembre 2020, au théâtre de verdure de l’Institut français de Cotonou.
Par Julien Tohoundjo
La Rue Bleue. C’est l’étiquette que porte la pièce de théâtre adaptée de l’œuvre originale de Sèdjro Giovanni Houansou. Elle a été mise en scène par Alougbine Dine, directeur de l’Eitb. Cette représentation a été assurée par Judicaël Avaligbé, Raphaël Hounto, Marcel Sokoulo, Josette Loupeda et Kaleb Doute. Cette pièce de théâtre est parue en 2016 aux éditions Flamboyant. Elle a bénéficié, en 2016, d’une résidence à la “Chartreuse de Villeneuve Lez Avignon” et du dispositif de la “bourse Odyssée du réseau des Centres Culturels de Rencontre”. La Rue Bleue a reçu, en 2019, le Grand prix littéraire du Bénin. Cette pièce présente l’histoire d’une rue et celle des hommes. Elle évoque la volonté d’un jeune intellectuel aspirant à s’investir dans la politique, à raser la Rue bleue, quartier « dépotoir » dans lequel il échoue un soir malgré lui.
De même, cette pièce établit un lien entre l’ancienne et la nouvelle génération. En effet, des projets d’urbanisation sont souvent lancés par les gouvernants pour mieux rénover les espaces. Mais l’histoire des hommes qui habitent dans ces lieux et la réalité de leur vie au quotidien sont bafouées. « Il n’y a pas de changement acceptable ou bénéfique qui n’implique, le plus profondément possible, la personne qui doit être affectée par ce changement-là. A priori, ce changement devrait parti de lui. La plupart du temps, nous perdons dans les processus de gouvernance, de démocratie et les autres régimes. Nous arrivons plus à mettre les bénéficiaires au cœur du changement », a expliqué Giovanni Houansou. Selon lui, cette pièce est une concordance entre l’univers de l’auteur et celui du metteur en scène. C’est ce qui explique l’originalité de cette œuvre. « La modernité ne peut pas être… »
Pendant plus d’une heure de représentation, les acteurs ont fait voyager le public à travers la musique, leurs faits et gestes, sous les lumières des projecteurs. Sans micro, chaque acteur se fait entendre par la dernière personne qui se trouve au fond de la salle. C’est un effort qui prouve le travail qu’ils ont fait en amont de cette représentation. Le jeu des acteurs a permis au public de capter le message de cette représentation. « Nous assistons, souvent, à une forme d’urbanisation où l’autre n’est pas considéré. C’est important pour moi de le dire, le pays ne peut pas se développer comme cela se fait en Occident parce qu’ils sont plus conscients de leur erreur », a souligné Hector Hounkpè, comédien, poète et directeur du Festival International du Théâtre du Bénin (Fitheb). Pour lui, il est important de savoir tirer leçon des réalités d’ailleurs afin de faire ce qui est mieux dans nos coutumes qui caractérisent notre humanité. « Cette joie, cette vie que nous portons à la rencontre du monde est importante. Nous devons faire en sorte que nos bâtiments ne restent pas désincarnés. La modernité ne peut pas être la désincarnation », a-t-il précisé.
Balafon, batterie, saxophone, violon, gong et d’autres instruments sont utilisés pour rendre, beaucoup plus vivante cette pièce. Ces musiques se combinent avec les paroles et le jeu des acteurs pour créer une harmonie agréable. Sur la scène et de part et d’autre du public, des barrières en tôles ont été disposées. Cela donne une forte impression d’être dans un enclos. Mais c’est une manière pour le metteur en scène de permettre au public de regarder de part et d’autre et de mieux suivre le jeu des acteurs. La disposition de la scène laisse croire que l’on se trouve bien dans une ruelle. Au milieu du public, une petite scène est disposée et c’est là où le musicien interagit avec les autres acteurs. A la fin de cette représentation, des images du projet d’urbanisation entrepris à Cotonou ont été projetées, mais de façon renversée. Il faut noter que Sèdjro Giovanni Houansou est né à Cotonou en 1987. Après une maîtrise en Sciences politiques, il poursuit sa formation universitaire avec un master en “Gouvernance et Démocratie” de la Chaire Unesco des droits de l’homme et de la démocratie à l’Université d’Abomey Calavi