«Fathallah TV. 10 ans et une révolution plus tard» est un documentaire de la Tuniso-Belge Wided Zoghlami sur, soi disant, le mal être des jeunes en Tunisie. Soi disant, parce que, finalement, au fur et à mesure que le film défile, on ne comprend plus très bien l’objectif de la réalisatrice, tellement le doc est subjectif et écrit d’une manière totalement débridée, aussi bien filmiquement que dans son montage.
Si l’on doit résumer «Fathallah TV. 10 ans et une révolution plus tard» de Wided Zoghlami, l’on pourrait écrire que ce documentaire est celui d’une petite bourge qui a décidé de faire copain-copain avec des jeunes d’un quartier populaire de Tunis, en l’occurrence Fathallah à Djebel Jelloud, et de faire un film sur eux. Parce qu’en toute sincérité, on ne voit pas d’autres explications.
La subjectivité d’une écriture débridée, aussi bien filmique que dans le montage, saute tout de suite aux yeux. Les personnages et le documentaire en deviennent antipathiques. Si Wided Zoghlami voulait que l’on prenne pitié d’eux, ben c’est complètement raté. Dommage, car l’idée n’était pas mauvaise au départ : montrer la non-évolution de la situation de jeunes dans les quartiers «défavorisés» sur une dizaine d’années. Mais le documentaire a, quelque part, desservi les jeunes.
Quand un jeune dit qu’il préfère dealer que d’aller travailler à l’usine, parce que cela rapporte beaucoup plus, il y a de quoi se poser des questions. Quand un autre dit qu’il est au chômage et on le voit circuler sur un scooter presque flambant neuf, il y a de quoi se poser des questions. Quand on voit un autre boire du vin et parler des difficultés de la vie, on se pose des questions. Tout cela nous montre juste que les jeunes aiment la facilité, qu’ils veulent avoir tout tout de suite, et qu’ils prennent prétexte à tout pour ne pas s’en sortir, mettant sur l’Etat leur décadence, même si certains sont, quelque part, clairvoyants dans la perception des choses, mais qu’ils préfèrent rester confiné dans leur «zone de confort» et s’apitoyer sur leur sort.
Dans le synopsis, on peut lire que «Fathallah TV. 10 ans et une révolution plus tard» est «trois destins de jeunes, un quartier, une décennie entre deux époques : 2007 – 2017, de la dictature à la démocratie. A travers les rues et les maisons de Djebel Jelloud, ces jeunes partagent leurs rêves et nous livrent un regard aiguisé sur le pays. En suivant le parcours de trois musiciens et son propre parcours d’artiste, la réalisatrice pose un témoignage sur le processus de création et son impact sur la vie de chacun. Par la musique, le film se fait »porte voix » d’une génération». Si l’on pouvait attribuer un adjectif à ce synopsis, il serait «mensonger», comme une publicité mensongère, et l’on pourrait dire que la réalisatrice a raté son coup de passage entre l’écriture sur papier et l’écriture sur écran.
Le documentaire part dans tous les sens. La réalisatrice ne pose pas «un témoignage sur le processus de création», parce que de création, il n’y a pas. Elle aurait pu faire abstraction de sa relation intime avec l’un des personnages du documentaire, en l’occurrence Halim Yousfi. Qu’est-ce que cela ajoute de savoir qu’ils ont été mariés, qu’elle l’a emmené vivre en Belgique, qu’il y a été emprisonné pendant trois ans et que sa libération était la fin de leur mariage ? Est-ce un règlement de compte, d’autant plus que Halim Yousfi dit qu’il s’est marié avec elle en grande partie pour avoir les papiers ? Du coup, et à cause de cela, le documentaire tire en longueur. Et d’1h15, il aurait très bien pu passer à 45 minutes, voire à moins si l’on retire les séquences gratuites, notamment lorsque l’on voit la réalisatrice et l’un des protagonistes autour d’une bouteille de vin, et les plans de coupe et d’insert qui ne servent strictement à rien.
Wided Zoghlami devrait revoir ses cours de cinéma et comprendre à quoi sert un documentaire !