Ce « 25 décembre », le père Noël ne viendra pas pour Mathilde. Cette nuit-là, loin de ses croyances de l’enfance, elle doit faire face à la réalité, celle qui n’épargne aucun être humain. Ironie du sort, ce n’est pas d’une mort naturelle qu’elle s’en ira. Mathilde sera exécutée pour ses convictions, sa liberté et son art.
Présenteau Marché des arts du spectacle d’Abidjan (Masa), la pièce béninoise « 25 décembre » a eu deux représentations. Une première le dimanche 8 mars au Cnac Café-Théâtre à Treichville et une 2e au Palais de la culture, le 11 mars.
La création théâtrale de Didier Sedoha Nassegande, metteur en scène, confronte deux amies d’enfance. Une qui a choisi de « vendre âme aux politiques » (Élisabeth), et l’autre victime de son indépendance, sa liberté et son engagement.
La scène se passe dans « Le couloir de la mort » où pour la dernière fois, l’épouse du politique qui « triomphe sans gloire » tente de rallier l’amie d’enfance arcboutée sur ses convictions. La politique est au cœur de l’histoire, les comédiennes avec dextérité et professionnalisme créent des émotions et les partagent avec le spectateur.
Au Cnac Café-Théâtre, la proximité des spectateurs de la scène a rajouté à l’émotion. Florisse Adjanonhoun (Mathilde) et Nathalie Bidossessi Hounvo Yekpe (Elisabeth) le submerge. Il semble embarquer pour un voyage dont l’atterrissage ne se fait qu’à la fin de la représentation.
Le spectateur remarque aussi le décor. Ici, la scénographie est une valeur ajoutée de la pièce. Les lumières et les portiques alignés permettent des passages d’une époque à une autre, du rêve à la réalité, de l’optimisme au pessimisme. Les échanges à huis clos entre les deux amies sont des souvenirs. Ce bon vieux temps, où, avec optimiste, elles pensaient que tout était rose. Mais aussi réalité, car elles doivent faire face à leur séparation, leur division, leur divergence.
Les dialogues convergent par moment. Et se donnent dos tout de suite. Les répliques sont parfois tendues. Les femmes s’approprient le discours politiques. Pourtant celui-ci n’évolue guère car l’intérêt personnel prime toujours.
Les 08 et 11 mars, le public du Masa a découvert cette belle création qui bouleverse à chaque fois. Un terreau de questionnements à soi et à la société. Un combat perpétuel entre le complice et l’opposant, la facilité et la difficulté, le corrompu et l’intègre. « 25 décembre » pose la question de l’engagement de l’artiste car nombreux sont ceux qui préfèrent « manger » dans l’assiette du bourreau du peuple.
SANOU A.