Ce 31 octobre 2019 au Cinéma 4e art de Tunis a eu lieu la 1ère mondiale du film nigérian Oloturè. Un des pays invité d’honneur des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), le Nigéria a sorti la grosse artillerie pour faire apprécier son poids, sa force et sa qualité au niveau du 7e art.
Oloturè, dernière réalisation de Kenneth Gyang, 106 minutes, s’inscrit dans la droite ligne du géant africain, au plan cinématographique. A savoir, toucher du doigt les problèmes sociaux, nuisibles et mettant à mal la société.
Oloturè qui signifie « Endurance » en langue Yoruba aborde de façon directe la question de la prostitution, et surtout celle de la mafia qui s’est installée autour de cette pratique. Le rêve qu’on fait miroiter aux jeunes filles avec la possibilité de gain plus important en Europe a vu se créer des réseaux d’exploitation et de trafic d’êtres humains.
Le film, dès le début, s’attarde sur la vie des prostituées. Le réal épie leurs tenues, leur lieu d’habitation, leurs chambres, leurs lits, le rangement de leurs affaires, leur lieu de marchandage, en un mot, leur condition. Car, ai-je lu quelque part, « La prostitution est une condition et non un job ».

Certaines actrices sur-jouent. Le director grossit des faits et fait durer les séquences. A la limite, on a le sentiment qu’il fait l’apologie de la débauche tant il cherche à être naturel.
Après avoir planté son décor, Kenneth entre dans le vif du sujet. Les filles doivent rendre compte après chaque soirée passée sur le trottoir. Les règles sont strictes. Et elles rêvent d’une vie meilleure non pas en décrochant pour de bon, mais en visant l’Europe.
Ainsi, s’entremêlent suspens, souffrances, exploitation, abus, , pratiques occultes, juju, déshumanisation, meurtre, emprisonnement.
S’il est clair que Noolywood dès sa création a pris le parti de la dénonciation, certains sujets, comme celui du trafic des êtres humains et des organes humains sont sous traités. Car le mal existe depuis longtemps.

En sus, la corruption au Nigéria est en grand format sous les projecteurs du cinéaste. Des petits exploitants des prostituées, aux dames d’affaires, en passant par les hommes politiques, les forces de l’ordre, les féticheurs, tout le monde a son quota. Pour ainsi, on a l’impression que les filles sont dans un labyrinthe sans aucune sortie.
Le focus Nigéria aux JCC a permis de revenir sur d’anciennes réalisations, mais et surtout de miser sur de nouvelles. Oloturè s’inscrit bien dans le concept de New Nollywood, avec de belles images, une belle histoire, des techniques cinématographiques maitrisées.
Pourtant, on est loin d’un chef d’œuvre. Cela est dû, peut-être, au fait que le Nigéria est resté longtemps dans le cinéma commercial et a laissé de côté l’artistique. Ce qui dépeint encore sur ses productions.
Sanou A.